Rations militaires
Des rations militaires "kaki dehors, pipi dedans"
Lors la première guerre du Golfe, en 1991, les soldats de la force internationale échangeaient à l'occasion leur frichti. Dans cette Bourse culinaire, une ration française se troquait contre deux, voire trois rations américaines. L'enchère pourrait encore grimper dans les conflits à venir.
Les chercheurs de l'armée américaine viennent en effet de mettre au point une nourriture lyophilisée qui peut être réhydratée par l'urine du banqueteur ou du cuistot.
Le New Scientist a révélé, fin juillet, cette avancée gastronomique. Une poche contient ce qui est supposé être du riz et du poulet. Elle est munie d'un filtre révolutionnaire qui ne laisse passer que les molécules d'eau, retenant 99,9% des bactéries et autres éléments indésirables.
Bien sûr, cette tambouille peut être réhydratée par autre chose que l'urine : par exemple l'eau croupie d'un marais, un fond de gourde ou, les jours d'agapes, la pluie. Bref, par tout ce qui répond de près ou de loin à la formule H2O, avec cette indication des concepteurs du centre militaire de Natick, Massachusetts : un usage prolongé de la recette peut entraîner des problèmes rénaux.
L'intérêt de cette nouvelle cuisine n'échappera ni au stratège ni au bidasse. Trois repas normaux, soit le ravitaillement d'une journée, pèsent 3,5 kilos sur les bretelles. Avec cette trouvaille, le poids est ramené à 400 grammes. Finie l'encombrante roulante. De toute façon, pour qui pense comme Coluche que la nourriture militaire c'est "kaki dehors, caca dedans", le nouvel ingrédient est un mieux gustatif.
Les chercheurs américains avaient déjà sur leur carte le "sandwich indestructible". Il pouvait rester frais trois ans par 26°C et six mois par 38°C. De quoi faciliter les appétits de conquête... Pour sa part, l'armée française sait bien, comme l'écrivait déjà le stratège chinois Sun Tzu, que l'intendance est essentielle au moral des troupes. Notre état-major continue donc de bichonner ses pioupious, à raison de 7,04 euros par repas.
Sans vouloir cracher dans la soupe, on laisserait bien volontiers ces bonnes recettes d'Oncle Sam à leurs inventeurs. Mais il faut avoir en mémoire que le cahier des charges hygiéniste édicté par la NASA pour ses astronautes, baptisé "HACCP", est aujourd'hui devenu la règle internationale qui régit jusqu'à nos petits marchés de pays. Alors...
Benoît Hopquin : Le Monde du 3 août 2004
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