15.6.04

Garde à vue pour quatre ados...

La police derrière la porte du proviseur

La proviseure a voulu faire un exemple. Les quatre adolescents qui ont jeté des pierres contre une corniche en face du lycée de Montgeron (Essonne), brisant une vitre, ont donc eu droit à un traitement exceptionnel. Mme Flamend aurait dit aux élèves : «Plus tu avoues, mieux ce sera.» Ils se sont donc livrés, mais ils ont été remis à la police qui attendait dans une pièce à côté. Menottés et emmenés dans une voiture de police stationnée dans l'enceinte de l'établissement. Pour une vitre brisée.

Georges Dupont-Lahitte, président de la FCPE, parle d'«une attitude d'abandon de responsabilité éducative, du tout répressif contre le tout éducatif». Nul ne conteste qu'un proviseur puisse faire appel à la police, mais pas d'échanger les rôles. Là, c'est la proviseure qui fait l'enquête et la police qui sanctionne la «destruction de biens privés en réunion». Quatre heures de garde à vue, fouille anale. Pour Roger Chudeaud, inspecteur d'académie de l'Essonne, «les choses se sont passées comme elles doivent se passer».

D'un point de vue légal, ce n'est pas répréhensible. Mais les parents, la FCPE, la Ligue des droits de l'homme se sont dressés contre cette collusion entre la police et la proviseure qui a abouti à des mesures sans rapport avec la faute commise. «On a démantelé le gang des lanceurs de pierres», aurait dit Mme Flamend en voyant les enfants emmenés par la police. Elle n'a pas pris la peine de prévenir les parents. Le père de Bruno a été averti le soir, par son fils qui lui a décrit la fouille à corps : «On m'a déshabillé dans le couloir, on m'a demandé de me pencher en avant et de pousser.»

Simple témoin dans cette affaire, Bruno a eu droit au même traitement que les autres. Devant l'insistance des parents pour la rencontrer, la proviseure leur a fait dire : «On vous recevra en temps voulu.» Quand elle les convoque, l'un d'entre eux suggère de renoncer à des poursuites scolaires. «Ils ont été assez punis», avance-t-il. Eh bien non, elle insiste, se réserve le droit de sanctionner les enfants d'un conseil de discipline. Elle renoncera finalement, mais le mal est fait. Le parquet d'Evry doit se prononcer aujourd'hui sur d'éventuelles suites judiciaires.

Ivan Franchi : Libération du 15 juin 2004
Sentinelle : Juniors : Violence